Été 2012. Comme quasiment tous les jours pendant ces trop courtes vacances, nous nous sommes levés tôt pour monter sur le bateau et se réveiller là-dedans :
Une grosse demi-heure de wakeboard sur une mer d’huile, ça réveille et ça permet de bien commencer la journée.
Retour au port, où nous sommes accueillis par notre voisin de panne, qui s’apprête lui-même à embarquer avec madame. C’est la première fois que nous le rencontrons ; il a la cinquantaine bien tapée. Il nous voit sortir le matériel, et discute avec nous tandis que nous rangeons tout et rinçons le bateau.
– Alors les jeunes, la mer est bonne ?
– Oui, nous revenons de faire une session de wakeboard, la mer était fantastique.
– Du wakeboard ? C’est quoi ?
Nous lui présentons la planche. Il découvre.
– Oh, c’est nouveau ça.
– C’est pour faire un peu comme un snowboard. Sur la neige.
– Ah, à mon époque, je faisais du ski, on était fous.
Nous sourions. On a du mal à imaginer cet aimable personnage, légèrement ventripotent, faire des 360 en monoski.
– Et ça s’apprend vite, ça, le wakeboard ?
– Oui, ça va très vite. Et puis moi [dit mon petit frère], j’en fais quasiment toute l’année dans un club à Paris.
– Oh ? À Paris ? Sur la Seine ?
– Oui oui, il y a des clubs.
Il a l’air plus intéressé, petite étincelle dans les yeux.
– Ah, j’en faisais aussi sur la Seine, on était toute une bande en club !
– Ah bon ?
– Oui, on était fous, on faisait n’importe quoi.
L’idée d’être fou pour skier sur la Seine fait sourire. Il continue.
– D’ailleurs c’en est au point où on avait été embauchés sur un film, moi et mes potes.
– Ah bon ?
– Oui oui, on avait été pris pour une petite scène, oh 30 secondes. On devait défiler sur la Seine en ski, avec des feux d’artifice accrochés au dos.
Là pour le coup nous sommes bluffés.
– Ah ça, il n’y avait que nous pour accepter un tel truc. Mais c’était marrant. Le réalisateur… Tu te souviens de son nom, chérie ? Ah, ça m’échappe. Il nous a fait faire des allers-retours sur la Seine, avec des pétards dans le dos et des feux d’artifice qui partaient de partout. C’était joli.
– Mais c’est super, ça ! Et vous vous souvenez du film ?
– Oh, c’était un truc artistique. Tu te souviens ? On est allé le voir, c’était vraiment nul. Mais on s’est bien marrés, et jamais on n’aurait pu avoir une autre occasion de faire ça.
– Effectivement. C’est fou ça.
– Ah, ça y est, je me souviens du titre : c’était « Les Amants du Pont-Neuf ». Une merde.
Je suis bouche bée. Quelque mois seulement après la Palme d’Or de Leos Carax à Cannes, avoir notre simple voisin de bateau nous raconter avoir fait le fou sur la Seine sur l’un des films de ce réalisateur…
Voici les 30 secondes en questions. C’était en 1991. Et l’une de ces têtes brûlées fait maintenant du bateau tranquillement sur la Méditerranée…
(back2blog, jour 5/10)
Une réponse sur « Mon voisin le skieur »
marrant ce genre d’anecdote 🙂 Et faire du ski nautique sur la Seine, ça doit être quelque chose oui !